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“Depuis le début des années 90, les professionnels des musiques du monde ont constitue des réseaux pour faciliter la circulation des artistes et des productions à travers l'Europe. En dépit des nombreux obstacles qui se dressent encore sur leur route, ces nouvelles structures ont profité à de nombreux artistes africains.”

L’EFWMF

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Au milieu des années 80, les professionnels européens passionnés de musiques du monde construisaient un nouveau marché. Au début des années 90, ils se sont structures en réseaux, une organisation qui a profité à la carrière de certains artistes comme Cesaria Evora, le Rail Band de Bamako ou Ali Farka Touré. Constitué de 35 festivals européens repartis dans 17 pays, l’EFWMF (European Forum of Worldwide Music Festivals) créé en 1991, draine aujourd’hui un public de 1,2 million de spectateurs. «~Le réseau a été créé au moment même où l’on annonçait la mort de la world music, alors que celle-ci n’a jamais enregistre autant de productions et de tournées~», déclare Peter Groote du Stinks Festival de Belgique. Les membres de l’EFWMF ont profite du réseau pour étendre son influence au delà des festivals d’été. «~Grâce a l’EFWMF, j’ai relance la carrière du Rail Band de Bamako, explique Christian Mousset, directeur de Musiques Métisses. Je l’ai fait découvrir notamment en Scandinavie. Les artistes font au minimum 4 a 5 festivals et si un groupe est soutenu par l’ensemble du Forum, il peut tourner à l’année~».

Un millier de professionnels en Europe

Prolongement de cette initiative, le Womex (Midem des musiques du monde) fut lance en 1994 a Berlin par l’EFWMF. Lors de sa troisième édition, qui s’est tenue a Marseille en octobre 1997, il a attire un millier de professionnels, un développement notable par rapport aux deux premières rencontres (Berlin et Bruxelles). Destiné à «~coordonner la circulation de l’information sur les musiques du monde au sein du public et des professionnels~», le Womex rencontre la faveur de tous. «~Le travail est plus efficace,~» explique Corinne Serres, tourneur de nombreux artistes dont Cheb Mami et Salif Keita, «~On repère mieux les gens, on peut débattre des problèmes qui se posent, découvrir des groupes, vendre ses artistes plus efficacement et obtenir des informations grâce aux guides qui fleurissent aujourd’hui sur le marché~» ». Le Womex facilite également le travail de distributeurs comme Night and Day, qui s’occupe de labels allemands, anglais et francais. «~Les bonnes ventes d’Ali Farka Touré, produit par World Circuit (250 000 exemplaires pour Talking Timbuktu), ont profité à l’ensemble des artistes du label comme Oumou Sangaré~», explique Maggie Doherty, l’attachée de presse de Night and Day.

Mais cette efficacité du réseau entraîne une concurrence exacerbée. «~Il nous faut aujourd’hui une promotion plus importante qu’il y a quelques années~», explique Christian Mousset. Une constatation qui n’a pas échappé aux animateurs radio européens. Réseau de radios publiques européennes, l’UER (l’Union Européenne des Radios) a suscité chez les animateurs passionnés par les musiques du monde la création en 1991 de la World Music Charts Europe, une sélection mensuelle d’artistes effectuée à partir des playlists de 40 émissions de world music et envoyée à 700 magazines, magasins de disques et de radios. Coordonnée par Tobias Maier de Radio Multikulti de Berlin, cette initiative s’accompagne d’ateliers annuels réunissant professionnels de radios et producteurs. «~Celui qui s’est tenu a Paris en septembre 1997, explique Nathalie Verdejo de RFI, a lancé l’idée d’une émission paneuropéenne de world music. Nous avons mis au point une maquette et cherchons a obtenir des fonds de la communauté européenne~».

Compromis à l’arraché

Cette question des moyens ne doit pas occulter d’autres problèmes. «~Le réseau, qui couvre 21 pays européens et concerne 130 producteurs de radio, se heurte a des frilosités et un manque de dynamisme~», explique Tobias Maier. «~Beaucoup de radios ne veulent pas diffuser ce programme parce qu’il est en anglais et certaines maisons de disques françaises invitées a l’atelier de Paris ne sont pas venues, car elles sont incapables de mesurer l’importance d’une promotion européenne~». Aux obstacles internes au réseau s’ajoutent les relations tendues avec les organisateurs du Womex. «~Pour les premières éditions, nous étions associés a l’organisation, puis nous avons été écartés~» , précise Tobias Maier. «~Ce qui devait au départ être une rencontre positive devient un espace de règlements de compte et de rivalités. Les deux prochains Womex seront organises par deux équipes différentes, un compromis obtenu à l’arraché à la fin des journées de Marseille~». A ces difficultés s’ajoute celle du déséquilibre régional, le réseau se concentrant essentiellement dans les pays d’Europe du Nord et, plus récemment, de l’Est. «~La world music ne passionne pas encore l’Europe du Sud. Mais nous commençons a avoir des contacts en Turquie, en Grèce et en Italie~», explique Tobias Maier. Mais ces obstacles ne rebutent pas la plupart des professionnels, qui s’attachent à élargir les potentialités des réseaux existants.

«~Le Womex nous a permis de développer des échanges avec les Etats-Unis et le Canada mais aussi d’envisager des coopérations avec les festivals du Sud. Musiques Métisses va aider le festival de Yaoundé qui doit se tenir au printemps prochain, le Womad de Peter Gabriel va s’associer a un festival du Zimbabwe et Sfinks de Belgique est a la recherche d’un partenaire africain~», explique Christian Mousset, un inconditionnel des réseaux. Il est vrai que son festival, né il y a exactement vingt ans, fait de lui un fin connaisseur de la scène européenne, de ses opportunités comme de ses complexités.

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Sylvie Clerfeuille

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