Une musique polyrythmique
Le 24 mai 1993, après, plus de 30 ans de guerre, l’Erythrée a déclaré officiellement son indépendance. Cette nation nouvelle est pourtant très ancienne par la culture, une culture enrichie des apports musicaux de neuf peuples couvrant les rythmes tigrina des hauts plateaux et les chants Saho, Kunama et Tigré des plaines. La musique traditionnelle tigrina appelée Guayla a une structure polyrythmique et utilise la gamme pentatonique accompagnant des danses en cercle. Les instruments traditionnels majeurs sont le khrar – une lyre à 5 ou 6 cordes, le Chira’wata – un instrument monocorde, le khebero – un tambour médium et l’Embilta – une flûte en corne.
Influences occidentales et soudanaises
La musique moderne Tigrina a évolué sous l’influence des missionnaires, un siècle de colonisation italienne, une décennie d’administration britannique et de transmissions de courants occidentaux comme le jazz, les musiques populaires diffusées 24h/24 par la radio militaire américaine Kagnew installée à Asmara du début des années 1950 jusqu’au début des années 1970. La musique moderne Tigrina a été doublement marquée par les instruments et les harmonies occidentales ainsi que par les musiques soudanaises, perses et turques.
Musique de libération nationale
Pendant la lutte de libération nationale, la vie culturelle et sociale de l’Erythrée s’est trouvée profondément limitée par le couvre feu et la situation de guerre. Donner des spectacles, jouer et même simplement écouter de la musique était banni dans les zones contrôlées par le gouvernement éthiopien. A cette période, la musique a donc été utilisée comme un moyen de diffusion du sentiment nationaliste. Combinant Guayla et styles contemporains accompagnant des chants à caractère politique, elle fut le principal vecteur et la mémoire de la guerre de libération. Nombre de musiciens comme Fitsum Yohannes, Abraham Afwerki, Berhe Gghelle, Yemane G. Michael furent des militants actifs de la cause érythréenne. Beaucoup durent s’exiler.
Dans de nombreuses œuvres des années 1990/2000, des instruments traditionnels ont été utilisés (par Berhe Ghelle et Abraham Afwerki notamment) mais certains comme le khrar ont été électrifiés. La plupart des artistes utilisent une instrumentation occidentale : basse, batterie , clavier, guitare. La guerre de libération marque de nombreux textes d’artistes comme « Meskerem I » de Teclay Isaac qui chante le 1° Septembre 1961, premier jour de la guerre de libération qui allait durer 30 ans, Fitsum Yohannes dans « Hedri » (un hommage martyrs de la guerre d’indépendance) ou « Eritrea » (une chanson patriotique) et Ghidéon Beraki incite les combattants à faire preuve de courage pour protéger le peuple dans le titre « Walta Eritrea ». Pendant la guerre de libération nombre de femmes ont chanté la liberté dont Fatema Ibrahim, Khadija Ali and Khadija Adamai.
La scène musicale actuelle doit affronter une situation sociale très difficile. Les musiciens vivant au pays ont une existence précaire. C’est grâce à l’apport musical et financier des Erythréens vivant eu Europe, aux Etats Unis et dans le Golfe que la scène musicale réussit à survivre. Cette influence de la diaspora est marquante dans l’évolution des tendances musicales qui intègrent aujourd’hui des genres comme le reggae (le groupe Nazaranes), le R&B (Rahel Ghilde, Bilen Band, Seneait Mehari) , la soul et le rap (Lula Band, Afro, Feven) sans oublier le jazz (Almaz Yebio) et l’opéra (Barnebas et Isayass Teweldebrhan). Les chanteuses populaires de la scène actuelle sont Almaz Tefferi, Seble Solomon, Faytinga et Helen Melles. Parmi les grandes voix masculines, on trouve Fitsum Yohannes, Fitsum Alem, Medhane Habtu, Layne Tadesse, Dawit Efrem, Michael Goithom sans oublier Zemach, Tareke Tesfahiwet, Al Amin Abdeletif, Elsa Kidane Ahmed, Hagos Berhane et Wedi Shek.. Plusieurs festivals de musique érithréenne sont organisés chaque année aux USA par des ressortissants comme le West Coast Eritrean Festival – ECC à Oakland – Californie (depuis 1989), le Western USA Eritrea Festival qui se tient à Richmond en Californie et accueille des artistes de la diaspora et le festival de Washington DC dont la dernière édition s’est tenue en août 2003.
*Sources :
Jaquette du CD “The future of Eritrea’s children” rédigée par Maekele Oguba michael et Al Amin Hasebela
Article de “Al Ahram – weekly on line” : 31 July – 6 August 2003 Abdallah Said: “From refugee camp to Cairo: an Eritrean journey by Gamal Nkrumah.”
www.eritros.org
Laissez un commentaire
Vous devez être logged in pour poster un commentaire.