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“26.338~km² - 12.712.431~h - Capitale : Kigali”

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Une musique longtemps préservée des influences étrangères

La musique rwandaise a très longtemps été préservée de toute influence étrangère : c’est seulement dans les années 1940/1950 que vont apparaître les premiers instruments occidentaux venus du Congo d’où la place de choix qu’occupe cette musique millénaire auprès de tous les Rwandais et même au sein de la nouvelle génération.

Musique d’épopées qui rappelle les hauts faits des guerriers et des rois (le roi Mutara II Rwogera du XVIIIe siècle ou le roi Kigeri IV au XIXe siècle, elle est liée à la danse et à la poésie qui joue un grand rôle dans la société rwandaise. Les musiques d’épopées se jouent avec l’inanga (cithare), l’Iningiri (violon), l’umuduri (arc musical) , likembe (sanza) et l’Ingoma, tambour sacré que l’on retrouve aussi au Burundi. On trouve également au Rwanda de très belles polyphonies marquées par une technique de voix de gorge, le guhogosa, que l’on retrouve dans toute l’Afrique de l’Est et dont Florida Uwera est une des représentantes actuelles. Les références de cette musique de cour sont les grands maîtres de l’inanga comme Victor Kabarira, Sebatunzi, Sentore, Sophie, une des rares joueuses d’inanga et surtout Bernard Rujindili dont le neveu Medard Namaganya perpétue l’héritage.

1950/1960 : Apparition des premiers instruments électriques

Dans les années 1950/1960, la guitare devient un instrument très populaire. Radio Rwanda diffuse beaucoup de musiques d’Afrique de l’Est (Kenya, Ouganda, Tanzanie) et du Katanga, des pays qui développent une musique acoustique fortement marquée par cet instrument: les Rwandais écoutent ainsi de très grands guitaristes comme les Kenyans Atori Suso et Fundi Konde ou le Katangais Jean Bosco Mwenda. Vont alors apparaître une multitude de groupes comme Les Copains, Sora, spécialiste de guitare sèche, puis plus tard Orchestre Ingeli, Orchestre Impala de Kigali, Les Amants de la Chanson, le Melodica Band et l’Orchestre de COK qui passent à la guitare électrique au milieu des années 1960. Tous développent un style néo-traditionnel qui intègre ces influences, la rumba et la chanson française (Hallyday, Sardou, Mike Brand, Dalida) et chantent dans diverses langues : kinyarwanda ou ikinyarwanda, lingala, français.

1980/1990 : les années terribles

Comme tout le pays, la scène musicale va être frappée de plein fouet par les années de guerre et le génocide. La guerre débute en 1983 quand 30.000 Rwandais à majorité Tutsi résidant en Ouganda sont expulsés. Cinq ans plus tard, 80.000 Rwandais Hutu fuient le Burundi voisin à la suite des massacres. En Octobre 1990, les exilés Tutsi qui constituent l’essentiel du FPR assistés de déserteurs ougandais occupent plusieurs villes du Nord Ouest du pays. Le conflit va s’envenimer jusqu’à la tragédie de 1994, qui entraînera le génocide d’un million de personnes.

Les musiciens vont être en première ligne de cette flambée de violence nationale. En effet, le plus gros mécène de la musique, Valenska Jehuhakwa qui finance et fait tourner la plupart des groupes développant Le rhumbato (un style influencé par la rumba et la musique des grands lacs), dont l’Orchestre Ingeli est un sympathisant du FPR. Beaucoup de musiciens sont alors jetés en prison et les instruments volés. Certains artistes vont fuir, d’autres seront tués dont Abel Ufitamahoro (membre de l’Orchestre Ingeli).

Une musique d’exilés

A la fin des années 1990, la plupart des artistes rwandais vivent en exil à l’exception peut-être de Médard Ntamaganya resté au pays et fidèle au style de son oncle Bernard Rujindiri. Cet artiste twa, une minorité pygmée du Rwanda longtemps méprisée a d’ailleurs fondé en 1991 une association pour la promotion des Twa. Tous les autres artistes se sont exilés pour fuir le génocide, parce que la scène nationale est désorganisée et que les instruments ont été volés. Les quelques groupes qui restent payent aux artistes des cachets de misère. La scène musicale rwandaise s’est donc déplacée au Canada avec Aron Tunga, Jacques Murigande aka Mighty Popo, initiateur du KigaliUp! Music Festival à son retour au Rwanda.

Mais plusieurs artistes se sont exilés à Bruxelles (Belgique) avec Muyango, Massamba, Ben Ngabo, ancien membre de l’Orchestre Ingeli, Suzane Inganzo, Ciza Muhirwa, Anunciata Mutamuliza, Suzanne Nyiranyamibwa, Hervé Twahirwa (propriétaire d’un studio à Bruxelles) et Cécile Kariyebwa qui fut membre fondateur de l’Orchestre urbain du Rwanda dans les années 1960 (elle a travaillé avec l’Orchestre Ingeli). D’autres artistes se lancent bientôt sur la scène européenne comme Charly M produit par Hervé Twahirwa, ou encore Corneille Nyungura aka Corneille et Beniwe, installés respectivement au Canada et en Belgique.

Pour maintenir vivante leur culture, les artistes de Belgique ont monté plusieurs associations dont Imitari, une troupe de danseurs et Inganzo Ngari, un collectif de musiciens et de danseurs fondé par Muyango et composé de Ciza Muhirwa, Ben Ngabo, Massamba, Hervé Twahirwa, etc.

Politique de réconciliation nationale

Au début des années 2000, la politique de réconciliation nationale et la reconstruction du pays poussent certains artistes comme Ben Ngabo à relancer la scène musicale nationale en montant des festivals ou des associations (Umuco de Muyango). L’unité du pays n’est-elle pas placée sous le signe de la musique ? Le symbole du Rwanda est en effet une harpe à trois cordes représentant les sylvicoles twa, les bergers Tutsi et les agriculteurs hutus.

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À propos de l'auteur

Sylvie Clerfeuille

Sylvie Clerfeuille

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