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Titres

 

  1. (mon beko)
  2. Chances
  3. Rocah
  4. Or
  5. Partons
  6. Séraline
  7. instrumental
  8. Bessorngola
  9. Mantakisoka
  10. Snapchack
  11. Petit Midam

Découvrez l’interview de Maminirina Rado qui revient sur la folle histoire du rôkarôka 

Roland Dieudonné Rabearison, « Vahombey » : « Que de rêves fous qui n’ont jamais vu le jour »

Un des pionniers du rock malgache, Vahombey s’est laissé perdre et se retrouve dans les questions sur l’époque du « Rôkarôka ». Un mouvement culturel et artistique plein de vigueur dans les années ’80. 

Midi Madagasikara : Vous avez prôné le « rôkarôka » durant votre carrière, de quoi s’agit-il vraiment ? Est-ce un état d’esprit ? Est-ce un genre musical ? Est-ce une forme de rébellion envers la pensée dominante ? Était-ce un cri de la jeunesse de l’époque ?

Vahombey : En 1988, Tsilavina Ralaindimby m’avait orienté vers le « Rock & Roots ». Ma formation académique d’ethnomusicologie m’a facilité le travail puisque ma démarche était nécessairement systématique. Et les musiques traditionnelles elles-mêmes, systémiques. « Rôkarôka » est un choix méthodologique. Avant de devenir un concept musical. « Raokaraoka » ! C’est ce que font actuellement les crues. Tout emporter en dévalant les pentes ! Très proche du fameux « rock ‘n roll », n’est-ce-pas ?

MM : Quand on parle de rock n roll, c’est souvent le contre courant, les marginaux ou ceux qui ne voulaient pas se plier à l’ordre établi… Et d’ailleurs, ils, si on se réfère aux sociétés occidentales, ont su changer des choses dans leur pays… Qu’en était-il du « raokaraoka » à Madagascar? En 1988, quel vent social, culturel soufflait sur le pays ?

V : 1988, notre socialisme s’ouvrait vers Bretton Woods. Le temple culturel de l’époque était « Speedy » à Andravoahangy Ambony. Une véritable institution qui fonctionnait comme un laboratoire. Iraimbilanja, par exemple, y a fait ses débuts. À mes yeux, c’était l’aurore du new-age local.

MM : Comme un laboratoire ?

V : La meilleure mémoire de cette bouillonnante époque était Dida Randriamifidimanana. Les têtes pensantes se regroupaient autour de lui. Vision moderne du monde déclinée en projets culturels opérationnels soutenus par des ateliers d’échange et de partage. Que de ferveur de part et d’autre ! Que de rêves fous qui n’ont jamais vu le jour, non plus.

MM : Des rêves fous ? Était-ce aussi possible de les réaliser dans une société se dirigeant déjà inexorablement vers une sorte de paternalisme ? Où la jeunesse se permettait seulement de rêver…

V : Des rêves fous, il y a ceux qui n’attendent que leur tour pour se matérialiser. Des rêves fous, il y a ceux qui se sont bel et bien réalisés. La jeunesse d’aujourd’hui en profite sans avoir à savoir comment leurs privilèges ordinaires ont d’abord été rêvés par leur aînés. Avant de devenir actuellement leurs banales réalités.

MM : Vous aviez une réputation de rockeur, dans la pure tradition, alcool, femmes, bagarres… Vous ne fuyez pas les excès. Le « rôkarôka » était-il aussi une valeur d’authenticité ? Et vos textes respiraient la rue…

V : Que peut-on attendre comme musique du « badass » dont j’assume le statut si ce n’est du Rôkarôka ? Violent en période des crues. Doux comme un ruisseau à d’autres saisons. Sinon, sec et austère comme le kere quand il faut. Ainsi va la musique Rôkarôka ! Selon les humeurs et les ressentis, les époques et les contextes aussi. Prônant la culture rock, par essence contestataire et underground par snobisme, Rôkarôka se fait le devoir de produire des titres dits « à réflexions ». Comme  » Révolisiona Vazimba « . Qu’en restera-t-il un jour ? À l’histoire de nous le dire.

MM : C’était et c’est tout de même aller à contre courant, Antananarivo était plutôt puritaine à une certaine époque… La vraie vie se passait souvent la nuit…

V : Un badass n’a nulle prétention de vouloir changer ou faire changer quoi que ce soit. Il vit selon sa philosophie. Souvent perçu comme contre-modèle, il sait ce qu’il ne veut pas et ce dont il ne veut pas. Il ose dire non quand il veut. Là est la particularité du badass, il incarne lui-même son message, sa nature et son être. Rebelle. Poursuivant dans ce sens-là, nous pouvons être amenés à penser Catharsis. Catharsis s’utilise en psychologie sociale et en psychanalyse. Après réflexion, je concède que Rôkarôka est cathartique. Crever des abcès. Oui.

MM : On peut parler de mouvement culturel que vous avez initié à cette époque ? Si oui, où en est ce mouvement maintenant ? Étiez-vous nombreux ? Et fallait-il être adepte de rock pour intégrer le mouvement ?

V : Beaucoup d’entre nous ont déjà disparu. La contre-culture que nous prônions est devenue la culture d’aujourd’hui. Avant d’être musique, le Rock est philosophie, posture, attitude et comportement. Un état d’esprit qui réunit autour d’un idéal de vie.

Voyez simplement le style de vie d’aujourd’hui si facilité par la technologie. Ainsi que la créativité qui en découle. La multiplicité d’expressions ! Les anciens en ont rêvé et ont beaucoup travaillé pour que la jeunesse d’aujourd’hui jouisse d’autant d’atouts face aux enjeux contemporains. Le culturel n’a jamais été aussi près de nous. Pratiquement, dans le creux de notre main. Android, Iphone !

MM : Est-ce que votre rythme de l’époque peut être suivi par les jeunes d’aujourd’hui avec le contexte actuel, au risque de se perdre de dévier ? 

V : Aucune époque ne peut sérieusement se comparer à une autre. Sauf subjectivement. À chacun, son opinion.

Maminirina Rado

Source : Roland Dieudonné Rabearison, « Vahombey » : « Que de rêves fous qui n’ont jamais vu le jour » – Midi Madagasikara (midi-madagasikara.mg)

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À propos de l'auteur

Sylvie Clerfeuille

Sylvie Clerfeuille

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