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Héritière de Maria Barba, chanteuse capverdienne des années 1920 qui laissa son nom à un des grands classiques de la morna, et de la chanteuse brésilienne Angela Maria, Cesaria Evora, a rendu son dernier souffle à Mindelo, sa ville natale le 17 Décembre 2011. La diva aux pieds nus venait d’avoir 70 ans. Héritière de Maria Barba , chanteuse capverdienne des années 1920 qui laissa son nom à un des grands classiques de la morna et de la chanteuse brésilienne Angela Maria, Cesar_ia Evora, a rendu son dernier souffle à Mindelo , sa ville natale le 17 Décembre 2011. Elle venait d’avoir 70 ans. ”

Cesaria et Herminia

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En dépit de sa carrière internationale qui fit d’elle pendant des années l’ambassadrice du Cap-Vert, Cesaria Evora n’était pas considérée par certains Capverdiens comme la représentante de la morna, ces derniers lui préférant Herminia, une des rares représentantes de la cantadeira traditionnelle, technique vocale spécifique où les femmes donnent à ce genre musical des accents rauques. Mais son histoire douloureuse, l’énergie de son producteur José da Silva, la force des compositions qu’elle a interprétées et le grain si particulier de sa voix bluesy empreinte de morabeza (langueur typiquement capverdienne) en ont fait un mythe international .

Derrière le rideau

Dans l’archipel, quand Cesaria Evora voit le jour en 1941, cohabitent plusieurs courants musicaux, la coladeira (musique rythmée), le fado portugais, les musiques brésiliennes, le funana, musique dansante des pauvres paysans noirs baptisé méprisamment par les colons portugais «~la musique des ploucs~», le batuque, rythme africain joué par les femmes et pratiqué dans les fêtes familiales, et la morna, musique nostalgique popularisée dans les années 20 par le compositeur Eugenio Tavares, chantée pour «~la partida~» (le départ) et les aubades et jouée dans les bars de la capitale. La jeune Cesaria a depuis son enfance baigné dans ce blues capverdien porté par le violon de son père et les titres de son cousin, le célèbre compositeur B. Leza. Adolescente sans le sou, Cesaria Evora fait ses classes dans les bars populaires de Mindelo où elle chante parfois pour quelques verres sombrant peu à peu dans l’alcoolisme, un démon qui la poursuivra jusqu’à ses derniers jours. Sa voix séduit également la bourgeoisie qui l’invite à chanter dans les fêtes privées mais derrière un rideau !!! Il lui faudra attendre 1982, elle a tout juste 41 ans, pour fuir cette terre sans avenir et tenter sa chance au Portugal puis en France.

Reconnaissance internationale

Ses débuts européens sont décevants, ses premiers albums, Tchitchi Roti, Bia Lulutcha et Distino di Belita composés avec le groupe Cabo Verde Show, noyant sa voix dans un style électrique, la coladeira , danse collée serrée des années 1950. Il lui faudra attendre encore neuf ans, pour découvrir sa voie musicale et son premier succès, avec Mar Azul, un album entièrement acoustique dominée par la morna et 2003 pour conquérir le monde avec Voz d’amor gratifié d’un Grammy Award. Tout le monde la réclame (Caetano Veloso, Marisa Monte, Emir Kusturica, Bernard Lavilliers, etc…), la diva aux pieds nus fait bientôt son shopping dans le monde entier, se voit couverte d’honneurs et poussée par ses producteurs, enchaîne jusqu’à l’épuisement les albums et les tournées, devenant une vraie machine à tubes. En Septembre dernier, la diva aux pieds nus faisait ses adieux à la scène, histoire de rompre cette histoire millènaire d’exil pour retrouver les plages de son archipel et cuisiner son célèbre «~cachupa~».

L’âme du Cap-Vert

Portée par les plus grands auteurs et compositeurs de l’archipel, Mendes de Carvalho, Luis Rendall, Nando da Cruz, Manuel de Novas, Morgadinho, Teofilo Chantre, Luis Morais, B. Leza, la Billy Holiday du Cap-Vert a charié dans sa voix empreinte de saudade des histoires d’exil, d’esclavage, de famine, de colonisation et d’amours tragiques, révélant au monde l’âme immense et poétique du Cap-Vert, poignée de cailloux éparpillés sur l’Atlantique tels des cauris contant le destin des peuples africains.

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À propos de l'auteur

Sylvie Clerfeuille

Sylvie Clerfeuille

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