Découverte de l’isacathamiya
A la fin des années 1950, Joseph Shabalala, originaire de la ville de Ladysmith, dans le Natal, s’initie au sein de la chorale Devan Choir aux chants isacathamiya, un style vocal né au début du 20° siècle dans les mines d’Afrique du Sud. Installé à Durban où il chante dans plusieurs chorales, il repart s’installer en 1964 dans sa ville natale et monte plusieurs groupes avant de fonder avec ses frères Ben, Headman (assassiné dans les années 1990 par un policier blanc) et Jockey (décédé en 2006), ses cousins Albert Thulani et Abednego Mazibukole et quelques amis, le groupe Ezimnyama Ngenkani (Les Noirs). Rebaptisé Ladysmith Black Mambazo, il fait à la fois référence à sa ville et au groupe Black Mambazo (la hache noire), un groupe des années 1940 dirigée par Aaron Lerole. Viendront s’y joindre plus tard ses fils Thamsanqa et Sibongiseni, Russel Mthembu et Jabulani Dubazana. Le groupe acquiert vite une réputation de meilleur groupe d’isacathamiya lors de compétitions qui assoient la réputation des chorales à travers le pays.
« Amabutho » et Cotozha mfana
C’est à la suite d’une émission de radio en 1970 que le groupe décroche son premier contrat discographique avec la maison Gallo pour l’album Amabutho. Ladysmith Black Mambazo propose alors une version de “ingoma ebusukuk” (musique de nuit) où Joseph Shabalala utilise la technique vocale “cotozha mfana” (marcher sur la pointe des pieds), description imagée de la capacité du groupe à glisser brusquement de chants chorals d’une grande puissance à des lignes très fines, très douces, à la limite du murmure. Ladysmith Black Mambazo est alors propulsé au devant de la scène nationale et décroche un disque d’or.
Graceland et Grammy Awards
Leur carrière internationale décolle en 1986 : le rocker anglais Paul Simon qui a entendu leurs voix sur l’album enregistré à l’occasion du festival zulu de Cologne en Allemagne en 1979 se rend en Afrique du Sud pour les rencontrer. Ils participent bientôt à l’album Graceland et à la tournée mondiale de promotion. Le succès phénoménal de ce dernier (10 millions d’exemplaires vendus) leur assure une notoriété internationale et un contrat discographique avec la Warner.
Produit en 1987 par Paul Simon, l’album Shaka Zulu est récompensé d’un Grammy Award en 1988 aux Etats-Unis, dans la catégorie “Best Traditional Folk Recording” (Meilleur enregistrement folk traditionnel). En vingt ans, Ladysmith Black Mambazo décrochera 19 nominations aux Grammy Awards dont une en 2007 pour l’album anniversaire Long walk to freedom auquel participent de nombreux artistes : Natalie Merchant, Vusi Mahlasela, Sarah McLachlan, Pete Seeger, the Mahotella Queens, Sarah McLachlan, Melissa Etheridge, Emmylou Harris, Taj Mahal, Zap Mama, Hugh Masekela. Ce succès leur vaut un concert à guichets fermés au Carnegie Hall de New York.
Hommage célèbre Nelson Mandela
Les années 1990 voient leur carrière gagner en créativité avec plusieurs spectacles musicaux dénonçant l’apartheid (The Song of Jacob Zulu en 1992 notamment), de nombreux concerts historiques (en 1993 à Oslo lors de la remise du prix Nobel de la Paix à Nelson Mandela, en 1994 pour son investiture à la Présidence, en 1996 à Londres devant la famille royale d’Angleterre et aux Jeux Olympiques d’Eté, devant le pape à Rome). Outre les collaborations avec des artistes étrangers (Dolly Parton, Stevie Wonder, Josh Grobin, Ben Harper, George Clinton…), Ladysmith Black Mambazo a participé à plusieurs musiques de films et de clips (un film de Marlon Brando, Do It A Cappella d’Eddie Murphy et Moonwalker de Michael Jackson). Le Roi Lion 2, sorti une quarantaine de disques, décroché plusieurs disques d’or et vendus plus de 7 millions d’albums à travers le monde.
Sauvegarder la culture sud-africaine
Professeur associé d’ethnomusicologie à l’université de Natal, Joseph Shabalala se bat au pays pour la survie et la transmission des cultures sud-africaines : il a monté “The Mambazo Foundation for South African Music & Culture”, soutenu dans son entreprise par Danny Glover et Whoopy Goldberg et organise à Durban depuis 1997 avec Linda Bukhosini le festival d’isacathamiya qui a réuni en Septembre 2007, 170 groupes.
Ouverture musicale
En 2002, le groupe a chanté pour le 50 ème anniversaire du règne de la Reine Elisabeth II en compagnie d’Eric Clapton, Rod Stewart, Joe Cocker, Phil Collins et Paul McCartney, interprétant notamment des tubes de Beatles. Depuis ses débuts où le groupe chantait un répertoire profondément zulu dans les techniques vocales comme dans la langue, il, a au fil des albums et des expériences, adopté diverses langues (dont l’anglais), expérimenté une multitudes de styles (rock, gospel, mbaqanga, kwela (jive), etc…) et même interprété des œuvres classiques de Bach, de Mozart et des musiques de chambre comme dans l’album No Boundaries.
Ladysmith Black Mambazo remporte deux autres Grammy Awards dans la catégorie “Best Traditional World Music Album” (Meilleur album de world music traditionnelle), avec Raise Your Spirit Higher en 2005, et Ilembe : Honoring Shaka Zulu en 2008.