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“Par sa double appartenance (père sénégalais, mère nigérienne), l'auteur-compositeur, arrangeur, interprète et poly-instrumentiste (guitare, harmonica, claviers, percussions), Ismaël Lo dit "Iso" est né le 30 août 1956 à Dogondoutchi au Niger. Il s'est imprégné très jeune des musiques wolofs, mandingues, folk, pop et soul. La guitare et l’harmonica, ses deux instruments de prédilection qu’il joue de concert, lui valent le surnom d’"Homme orchestre". A la mort de son père en 1970, il s’inscrit à l’Ecole des Arts de Dakar et se prend de passion pour la peinture. Son fameux titre "Tajabone" le fera connaître sur la scène internationale en 1991...”

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Musique ou peinture ?

Repéré par son compatriote et producteur Ibrahima Sylla, Ismaël Lo enregistre en 1981 « Gor Sayina », un premier opus influencé par le style du folk singer sénégalais Seydina Insa Wade. Il y assure seul les guitares, l’harmonica, le lead vocal et les chœurs, offrant une riche variation tonale et des arrangements dépouillés comme dans « Yaye boye balalma » (« maman chérie, pardonne-moi » en wolof). Dès lors, le grand public sénégalais découvre celui que l’on surnommera « l’Homme orchestre » et ses chansons à textes sur fond de folk lui valent, selon les mélomanes, le surnom de « Bob Dylan africain » ou de « Brassens africain ».

Omar Pène & Super Diamono

Artiste solitaire, Ismaël Lo croise bientôt la route du groupe Super Diamono de Dakar et se forme auprès de son leader Omar Pène. Ensemble, ils donneront quelques concerts au Sénégal et en Gambie avant qu’il ne s’échappe à nouveau, s’exilant l’espace de quelques mois à Las Palmas où il expose ses toiles et remplit des fonctions de décorateurs. Mais son intermède hispanique finit au Coco Loco, une boîte de nuit qu’il anime chaque nuit : la musique reprend bien vite ses droits et l’oiseau rentre au nid, s’engageant alors dans une carrière professionnelle.

Le mbalax folk

Son disque « Xalat » (« pensée » – 1984) réalisé à Paris lui vaut un succès d’estime mais c’est « Xiff » (« famine »), sorti deux ans plus tard, qui fait découvrir son style au grand public. Son alchimie spécifique de mélodies et rythmes mbalax, de musiques mandingues, de folk ou de funk est chantée en wolof, en français, en anglais ou en malinké. Son ascension sera confortée avec la sortie, en 1987, de « Natt » (Essor) dont, déjà, le fameux « Tâdieu bône » (évocation de l’Achoura, une fête religieuse célébrée le 10e jour du nouvel an musulman), repris plus tard sous l’intitulé « Tajabone ») : Ismaël Lo donne deux concerts essentiels au New Morning à Paris et au Festival d’Angoulême. Après la parution, en 1988, de « Diawar », un album beaucoup plus mbalax qui connaît un réel succès au Sénégal, il crée son propre label, Ilopro (Ismaël Lo Production), et réalise, en 1990, « Wadiour » (parents), un opus dédié aux parents en général et à ses parents en particulier. Dans la nouvelle version de « Tajabone » (Barclay – 1991), son mbalaxfolk à base de guitares, d’harmonica, de claviers et de cuivres aux belles lignes mélodiques soutenues par une rythmique basse et des percussions légèrement en retrait et mises en valeur pas sa voix mélancolique et profonde signe sa consécration. Afrique, Etats-Unis, Japon, Europe : le folk-singer sénégalais part à la conquête du monde. L’année 1992 le voit remporté le Trophée RFI Sacem lors du concours Découvertes.

Reconnaissance occidentale

Aussi bien à l’aise dans le mbalax aux rythmiques dansantes que dans les ballades fluides, Ismaël Lo est un des artistes dont le succès ne s’est jamais démenti et qui a signé une série d’albums réussis, proposant comme dans le CD Iso (Mango/Island – 1994), des titres mbalaxfolk (« Dibi dibi rek » qui veut dire  » rien que de la viande grillée »), mandinka (« Nafanta » en duo avec Ousmane Touré), mbalax rythmé (« Sénégambie » sur les liens étroits entre le Sénégal et la Gambie) ou en français (« La femme sans haine » écrit par Etienne Roda-Gil). Ses collaborations originales se poursuivent avec la parution, en 1996, de « Jammu Africa » chez Mercury, un remix de quelques uns de ses tubes : dans « Without blame », un superbe duo avec la chanteuse anglaise Marianne Faithfull, Ismaël Lo alterne chant en anglais ou en français et riffs d’harmonica très mélodieux relayés par des doses de lignes de violons. La même année, il assure la première partie de Jane Birkin à l’Olympia avant de poser avec finesse sa voix au timbre clair sur le titre « Der rand der welt » de l’album « 1000 vies » du Suisse Stephan Eicher.

Le 7ème Art et les honneurs

Reconnu par le cinéma africain en tant que compositeur de bandes originales et comédien (« Tableau ferraille » de Moussa Sène Absa en 1996, « Afrique mon Afrique » d’Idrissa Ouédraogo en 1997 et « Camp de Thiaroye » d’Ousmane Sembène en 1998), Ismaël Lo l’est tout autant par le 7ème Art européen : le cinéaste espagnol Pedro Almodovar est subjugué par son titre « Tajabone » qu’il insère en 1999 dans l’illustration sonore de son film « Tout sur ma mère ».
Après la sortie, en 2001, de « Dabah » (il est gentil), du surnom du guide spirituel des Tidjani sénégalais, El Hadj Abdoul Aziz Sy (décédé en 1997), Ismaël Lo est fait Chevalier des Arts et des Lettres en France et en 2002, il est Chevalier de la Légion d’Honneur.

Ismaël, le conscient

En 2006 il rend à son son tour un hommage à son pays avec l’album « Sénégal » où il loue la bravoure des paysans et des travailleurs, respectivement dans « Baykat » et « Ouvriers ».
Très sensible aux problèmes de son époque qu’il n’a cessé de clamer dans ses chansons comme « Raciste », « Africa Démocratie », « Xiff » (sur la famine au Sahel et en Ethiopie), Ismaël Lo l’est tout autant à ceux des enfants (« Diour sani » sur les enfants abandonnés et les enfants des rues ou « Talibé » sur les enfants mendiants).

Sans tambours ni trompettes, cette grande figure de l’afro folk africain, Ordre du Mérite Culturel Tunisien (1994) et Chevalier de l’Ordre National du Lion (Sénégal – 1999), a construit avec ses propres deniers (cachets des spectacles et royalties) une école primaire dans la banlieue proche de Dakar, une manière de contribuer concrètement à l’éducation et à l’épanouissement des enfants.

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Nago Seck

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