Omar Pène
Né en 1954 à la Médina à Dakar, Omar Pène passe son enfance à de Pikine (banlieue populaire de Dakar), et connaît très vite des problèmes qui l’amène à fuguer de la maison paternelle à l’âge de 13 ans. Mais son talent pour le football le sortira de la rue. Il sera d’ailleurs champion junior des « Navétanes », le tournoi de foot des quartiers organisé pendant la saison des pluies au Sénégal. Plus tard, Omar Pène est engagé par le club de son cœur, le Jaraaf de Dakar, l’une des équipes les plus populaires du pays. Il consacrera des chansons à sa passion première, « Diaraf (Jaraaf) Football Club de Dakar » (1988) et « Navétanes » (1999). Mais le jeune homme est aussi passionné par le chant qu’il pratique parallèlement au sport. Il est bientôt repéré par Baïla Diagne du Kaad Orchestra qui lui propose d’intégrer son groupe.
Quand Le Diamono devient Super
En 1975, naît Le Diamono, un groupe composé par d’anciens musiciens de Super Tropical Jazz de Mady Konaté et du Kaad Orchestra. Surnommé à ses débuts « Orchestre Diagne », en référence au nom de famille de la majorité de ses membres, le Diamono propose une fusion de variété, d’afro-cubain et de pop chanté en wolof. Ce style est gravé par Musiclub sur le premier opus du groupe, « Biita – Baane », ainsi que sur le 45T « NDiaye Kandiourane / Lam-Lamo ». Après le départ de la plupart des membres, Omar Pène fonde en 1977 le Super Diamono et donne une nouvelle orientation à l’orchestre. Il lance alors un nouveau style baptisé « afro feeling » ou « mbalax –blues » à cause de leurs sonorités jazz et blues. Ses 45T (« Yo Bale Ma / Woy Na La », « Adama Ndiaye / Madiara Ngone ») et albums (« Le mbaxal », « Geedy Ndayaan ») parus la même année offrent une musique jouée avec des instruments occidentaux (guitare, basse, batterie, claviers…) et africains (sabars notamment) et soutenant des textes sur le social, l’éducation, la justice, l’enfance, le chômage, la paix, le respect, le spirituel, les femmes…
Ismaël Lo et Super Diamono
En 1983, Ismaël Lo rejoint le Super Diamono d’Omar Pène avec lequel il enregistre une cassette de 6 titres (« Diolakele », « Diongoma », « Gorsayna », « Chauffeur », « Diom », « Talibé »)… Bientôt, Ismaël Lo choisit de poursuivre une carrière solo mais retrouvera plusieurs fois son ami Omar Pène pour des jams ou des duos dont « Casamance » (2005), un hommage aux victimes du bateau Joola qui reliait Dakar à la Casamance : le 26 septembre 2002 au Sénégal, le naufrage du Joola a fait plus de victimes que Le Titanic : 1.953 morts et seulement 64 rescapés.
People, l’envol international
En 1984, grâce à N’Doffène Fall, ancien footballeur reconverti dans les affaires, Omar Pène et Super Diamono se rendent à Paris (France) pour un concert enregistré en public les 14/15 octobre au club Phil One à la Défense. Les sorties de « Mam – live » (1986) et de « People » (1987) permettent au grand public occidental de découvrir la voix mélancolique d’Omar Pène et les arabesques bluesy du guitariste Lamine Faye dans le titre de l’album. Les chansons traitent entre autres de thèmes comme l’injustice, l’intolérance (« Dou wey ») ou l’apartheid (« Soweto »)…
La sortie de « People » signe l’envol international du Super Diamono qui réalise une tournée européenne et américaine : sur scène comme sur disque, le percussionniste Alassane Djigo assure la rythmique mbalax tandis que le bassiste El Hadj « Bob » Sène et le batteur El Hadj Ousmane « Lappa » Diagne donnent le beat jazz–funk, relevé par la trompette d’Ibou Konaté. Quant à Omar Pène, il s’apparente par endroits aux bluesmen US par son timbre vocal tandis que Mamadou Maïga à la voix aiguë, plaintive et haut perchée penche vers le style griottique. Moussa Ngom, l’original du groupe par ses tenues colorées, apporte le rythme xiin des « bayefall » (confrérie musulmane du Sénégal) mais aussi la couleur mandingue par certains de ses chants en langue socé. Au départ de ce dernier en 1988, la formation enregistre successivement « Cheikh Anta Diop », un hommage à l’égyptologue sénégalais réalisé avec Tito Puentes puis « Nila » (c’est comme ça), une œuvre d’Omar Pène. Mais les nombreuses défections freinent l’ascension du groupe.
Reconnaissance internationale
Après les départs de Lamine Faye et de Bob Sène, Super Diamono se constitue en société anonyme. Il continue à développer son mbalax –blues, se produit sur plusieurs scènes du monde (Afrique, Europe, Amérique…) et grave plusieurs albums et cassettes : « Nila » (1992), « Fari » (1994), en référence au célèbre conte wolof, « Fari, l’ânesse », extrait du recueil Les Contes d’Amadou Coumba de Birago Diop, « 20 ans déjà » (1996), « Tiki-Tiki » (1997) ou « Direct from Dakar » et « Diapason 98 vol 1 & 2 » (1998). La même année, Omar Pène est sacré « Meilleur musicien africain 98 » en Amérique du Nord par la télévision CFTV-TV (Canada) puis reçoit à Sun City au Nord-Ouest de Johannesburg (Afrique du Sud) le « Kora d’or 98 » des Kora Awards. Ces distinctions seront relayées par ses fans à travers le monde, avec la création de l’AFSUD, l’Amicale des Fans du Super Diamono : Sénégal, du Mali, Mauritanie, Etats Unis, Canada, France, Belgique, Italie, Espagne, Pays-Bas…
Suivront plusieurs autres albums dont « Diamono Groove » (2000), « Lampe » (2003) ou encore « Tey – 30 ans déjà ». Après le rythmé « Mayamba » (2005), Omar Pène amorce un nouveau tournant musical avec « Ndam » (2009). Loin du mbalax rythmé, il réalise ici, avec Alain Genty (connu pour ses collaborations pour des artistes bretons) et Thierry Garcia (Olivia Ruiz, Alain Leprest, Romain Didier…) un album acoustique, avec guitares, voix, kora, banjo, accordéon, cuivres… .
Omar, le militant
Parallèlement, il soutient les enfants des rues, se battant pour la réinsertion des « talibés » (CD « Diadieuf – kaarapit »), ces enfants confiés par leurs parents à des « soit disant hommes de Dieu » (certains marabouts ) pour une solide éducation religieuse mais se retrouvent maltraités et utilisés comme mendiants. Ayant vécu une enfance difficile (parents divorcés), Omar Pène est aussi un fervent militant de la lutte contre la polygamie : « La polygamie a des effets néfastes dans la société. Elle suscite la jalousie, le mépris et l’inertie. Un homme qui a trois femmes et trente gosses n’a pas souvent les moyens de payer leurs études ni même de les nourrir. »
Le jeudi 10 mars 2022 au musée des confluences à Lyo,n en France, Omar Pène remporte le prix « Coups de cœur, musique du monde » de l’Académie Charles Cros pour l’originalité et la qualité de sa musique.
Laissez un commentaire
Vous devez être logged in pour poster un commentaire.