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“Des prises de positions polémiques soutenues par un afro-reggae aux parfums mandingue chanté d'une voix limpide en dioula (sa langue), en français ou en anglais ont fait de Seydou Koné aka Alpha Blondy, né le 1er janvier 1953 à Dimbokro en Côte d’Ivoire, l'incarnation d'une jeunesse africaine en pleine effervescence. Sa carrière sera lancée par Fulgence Kassy, alors producteur de l'émission “La Première chance” (Radiodiffusion télévision ivoirienne (RTI)) en enregistrant en 1982 son premier 33 tours "Jah Glory" dont le titre "Brigadier Sabari" dénonçant les violences policières dans son pays deviendra un gros tube dans toute l'Afrique... Par la suite, Alpha Blondy enregistre de nombreux albums et tourne dans le monde entier avec son groupe The Solar System. ”

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Echec américain et succès ivoirien

De son vrai nom Seydou Koné, Alpha Blondy fonde au lycée son premier groupe, Atomic Vibrations, puis part terminer ses études d’anglais au Liberia et aux USA où il se lie au milieu jamaïcain de New-York. Après l’expérience de plusieurs groupes dont il devient le chanteur (dont celui de Monyaka), Alpha Blondy rencontre Clive Hunt, un producteur jamaïcain qui l’arnaque et lui vole les bandes de ses démos. Alpha décide alors de retourner au pays : il y sera lancé par Fulgence Kassy alors producteur de l’émission “La Première chance”, et enregistre en 1982 son premier 33 tours Jah Glory dont “Brigadier Sabari” dénonçant les violences policières en Côte d’Ivoire. Cet opus sera disque d’or et lancera définitivement sa carrière. Alpha Blondy accumule bientôt les tubes avec “Cocody Rock”, “Sweet Fanta Diallo” ou encore “Binrou Wéré Wéré”.

Rasta Poué

Bientôt célèbre dans toute l’Afrique de l’Ouest, le jeune “voyou” vêtu d’un treillis, défenseur des jeunes et des déshérités et porteur d’un message de paix devient la coqueluche de la jeunesse. Son succès est tel que le gouvernement ivoirien lui organise un concert à Yamoussoukro devant 15.000 personnes, en 1983, année où cette ville devient la capitale politique et administrative de la Côte d’Ivoire. Sa réputation gagne bientôt l’Europe, avec le fameux succès, “Rasta Poué”, et il se produit au Zénith à Paris. Son succès foudroyant s’explique par la beauté de ses mélodies, un afro-reggae mandingue chanté en dioula (sa langue), français ou anglais, avec des messages puissants, émaillés de proverbes africains.

Apartheid Is Nazism

En 1985, paraît « Apartheid Is Nazism » qui confirme son exigence en matière musicale (arrangements des cuivres et des guitares) et sa philosophie : paix, liberté, lutte contre l’intolérance. Ses textes laissent aussi apparaître sa foi en l’homme.

Jah Houphouet

L’année 1987 le voit réaliser « Revolution », un album de 7 titres comprenant « Sweet Fanta Diallo » ou encore « Jah Houphouet Boigny nous parle (Rassemblement Démocratique Africain) » où il pose sa voix sur un discours du Président, un hommage au leader historique de la Côte d’Ivoire. Il offrira un double de son disque d’or au président.

Conflit israélo-palestinien

Sa rencontre avec le chanteur français Julien Clerc lors de sa tournée à Abidjan le médiatise en France. Il sort bientôt « Jérusalem », enregistré avec The Wailers et mixé à Tuff Gong Studio à Kingston (Jamaïque). Cet album introduit par un chant hébreu, hommage à la ville sainte des trois religions du Livre (juifs, chrétiens, musulmans), et appel à la paix entre juifs et arabes, sera renforcé par son message en hébreu au Maroc et en arabe en Israël.

En 1990, « SOS Guerre Tribale » dénonce les dangers des replis identitaires, un message prémonitoire annonçant les troubles futurs de la Côte d’Ivoire. En effet, le 24 décembre 1999, à la suite d’une mutinerie qui se transforme en coup d’État, le président Henri Konan Bédié est renversé par l’armée. Le concept d’ivoirité disparaît mais la tentation xénophobe persiste.

Yitzhak Rabin

Après des relations houleuses avec le showbiz français (il annulera deux concerts au Zénith à Paris), Alpha se passionne pour le multipartisme et dénonce l’immaturité politique dans Masada (1992) – « multipartisme, c’est pas tribalisme ». Il y évoque la guerre du golfe, le drame libérien et rend hommage à Fulgence Kassy, décédé des suites du Sida. En 1993, il est rejoint par Mao Otayeck comme chef d’orchestre et guitariste. Ils collaboreront durant 10 ans. Réconcilié avec le showbiz occidental, il reprend bientôt ses tournées en Occident et réalise plusieurs albums, dont « Yitzhak Rabin » (1998) enregistré en Jamaïque dans le studio Tuff Gong de Bob Marley en compagnie de Rita Marley et d’Errol Brown, un hommage à l’homme de paix assassiné. Ces titres comme “Armée française” et “Les Imbéciles” sont toujours le signe de son engagement .

Suivront « Elohim » (1999) et « Paris Bercy 2000 » (2001), « Amen » et « Merci » en 2002. Dans le cadre de ses 20 ans de carrière, il effectue cette même année une tournée dans toute l’Afrique de l’Ouest, annulant néanmoins deux concerts au Burkina Faso, pour raisons de sécurité, les deux pays (Burkina Faso et Côte d’Ivoire) traversant une sérieuse crise politique.

En guerre contre l’ivoirité

Le non respect des accords de Marcoussis signés le 25 janvier 2003 en France plonge bientôt le pays dans le chaos et les règlements de compte. Persécuté par les jeunes patriotes du président Gbagbo qui le dénonce comme un homme du nord, Alpha Blondy voit sa famille menacée physiquement mais poursuit néanmoins sa carrière internationale, devenant un féroce dénonciateur du concept d’ivoirité.

En février 2003, il est nominé aux Grammy Awards, puis tient la tête d’affiche dans la Fiesta des Suds à Marseille (France), après une tournée aux Etats-Unis, au Canada et à l’île Maurice…, une année conclue par la sortie d’un “Live au Zénith” reprenant des titres comme “Masada”, “Jérusalem”, “Cocody Rock” et “Multipartisime”. En 2005, sort “Radical Roots from the Emperor of African Reggae”, une compilation du label Union Square qui permet de découvrir ou redécouvrir des titres comme “God Bless Africa” et “Who are you”.

Tête de pont du reggae africain, Alpha Blondy s’est également lancé dans la production : il a créé un label de production et un studio d’enregistrement, le Studio Roger Fulgence Kassy en mémoire à l’animateur de la RTI qui a contribué à lancer sa carrière.

Mystic Power

2013 signe, avec l’opus « Mystic Power », sa “Réconciliation” avec Tiken Jah Fakoly et exprime un désir de paix et de reconstruction pour la Côte d’Ivoire, pays ravagé par des années de guerre civile. Fin d’année, Wagram sort « Best Of », une double compilation de 22 titres, avec des hits dont, “Jerusalem”, “Brigadier Sabari”, “Cocody Rock”, “Sweet Fanta Diallo”, “Travailler c’est trop dur”, “Multipartisme (médiocratie)”, “Boulevard de la mort”, “Rasta poué”, “Boulevard de la mort” ou encore “Politiqui”.

Positive Energy

Le 20 avril 1995, Alpha Blondy sort chez Wagram « Positive Energy », un album fidèle à son afro-reggae/mandingue/rock, soutenu par une solide rythmique basse, des chœurs bien balancés, avec des textes engagés et des messages de paix chanté en dioula (mandingue), français ou anglais. Le titre “Allah Tano”, réalisé avec son compatriote et reggaeman Ismaël Isaac, le Marocain Issam et le Tunisien Naoufel Mahbouli, tous trois chanteurs, est une chanson dédiée à sa grand-mère qui l’a élevé, et dont la photo est sur la pochette. Quant à “Madiba m’a dit”, chanson écrite par Valérie Fayolle (journaliste présentatrice sur France 24), c’est un hommage à Nelson Mandela.

Comme à son habitude, Alpha Blondy assène ses vérités sur le continent africain : “Freedom”, en featuring avec le reggaeman jamaïcain Tarrus Riley, est un appel à la liberté et une dénonciation de la pauvreté et de la misère. Dans “Macloclo ou Maclaca”, il fustige l’absurdité de certains dirigeants africains, en disant dans le texte « Tyrannie démocratique, génocide démocratique, tortures démocratiques… ». “Ingratitude” parle de l’ingratitude du pouvoir. “Séchez vos larmes”, une chanson sur la peine des mamans africaines pleurant leurs fils disparus aux combats, est enregistré en featuring avec la chanteuse Pierrette Adams du Congo Brazzaville.

Quant à “Querelles inter-minables”, c’est une chanson sur les dangers des replis identitaires, la crise et les années de guerre civile qui ont miné son pays, la Côte d’Ivoire. Le titre “N’Téritchê”, pont culturel entre l’Afrique, la Jamaïque et les Antilles, est réalisé avec Jacob Desvarieux, excellent guitariste et membre fondateur du groupe de zouk Kassav’.

Destiné à transmettre des messages de paix, d’apaisement, de liberté et de tolérance, l’opus « Positive Energy » est enregistré dans son studio à Abidjan (Côte d’Ivoire), avec les ingénieurs du son Laurent Dupuy et Guillaume Lejault.

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Sylvie Clerfeuille

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Nago Seck

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