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Désireux de créer un théâtre populaire et accessible à tous, Souleymane Koly fonde en 1974 l’Ensemble Kotéba qui signifie l’ensemble du grand escargot : en bambara, “Koté” veut dire l’escargot et “Ba”, ce qui est grand. “Kotéba” est aussi une sorte de théâtral traditionnel pratiqué au Mali lors des récoltes, qui tient de la satire socio-politique et recourt au chant et à la danse. Ce genre offrait l'occasion à tout un chacun de raconter tous les faits et méfaits d’un village. En faisant revivre cette technique, Souleymane Koly veut revivifier une tradition et pérenniser un patrimoine. Une façon particulière de célébrer l'Afrique dans ce qu'elle a d'unique : une créativité intarissable. ”

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Adama champion

Avec l’Ensemble Kotéba qu’il apelle aussi “Kotéba grand format”, une troupe de théâtre, musique, danse et contes, Souleymane Koly sillonne l’Afrique et le monde, présentant des spectacles aux contenus truffés de métaphores sur les problèmes politiques et socio-économiques du continent. De 1974 à 1991, date du montage de L’opéra mandingue « Waramba », l’Ensemble Kotéba multiplie les créations et voit se succéder une génération de comédiens talentueux : Gondo Pierre, Mariam Cissé ou Mamie foutou : des jeunes créateurs qui s’illustrent dans « Adama Champion » en 1981, « Fanico » en 1982 (dont est extrait un 33T) ou encore “Cocody Johnny” (co-écrit par Souleymane Koly et Koffi Kwahulé) en 2004… Le milieu des années 1980 voit Souleymane Koly devenir consultant auprès de diverses organisations internationales dont l’Unesco, la CEE (Communauté Economique Européenne), mais aussi de quelques gouvernements, notamment africains. En 1987, l’Ensemble Kotéba participe à la bande originale du film “La vie platinée”, dont est extrait un maxi 45T, réalisé avec l’auteur, compositeur, arrangeur, musicien, pianiste, claviériste, réalisateur et producteur français François Bréant ((parole et musique).

La restructuration voit l’arrivée d’une nouvelle vague de comédiens dont le « baptême du feu » a lieu en février 1990 avec « Commandant Jupiter et ses black Nouchis », une création révélant de jeunes artistes très talentueux, comme Rokiya Koné, Maaté Keïta, Awa Sangho, Niama Kanté, Akhoun Paul-Marie… Troupe pluri-ethnique regroupant des artistes de divers pays de la sous-région, l’Ensemble Kotéba est, depuis le début des années 1990 une structure pluridisciplinaire composée de la formation théâtrale de Kotéba dit KGF (Kotéba Grand Format), du JBAN (Jeune Ballet d’Afrique Noire), et du groupe musical Les Go de Kotéba.

Les Go de Kotéba

De l’Ensemble Kotéba, Souleymane Koly fait justement émerger trois jeunes filles, Niama Kanté (Guinéenne), Awa Sangho (Malienne) et Maaté Keïta (Ivoiro-Guinéenne), toutes les trois ayant intégrer l’Ensemble Kotéba très jeunes, avec de réels talents pour la musique et le chant. Afin de mieux développer leurs réelles aptitudes pour leurs disciplines, Souleymane Koly décide de fonder en 1993 Les Go de Kotéba (les nanas du grand escargot) : “Go” est un langage des jeunes Ivoiriens qui veut dire “nana”.

Tout en restant membres de l’Ensemble Kotéba, les trois filles tournener dans le monde et sortent des albums, avec la participation de Souleymane Koly comme auteur, compositeur, arrangeur, directeur musical ou producteur : Les Go de Kotéba (1997), arrangé par Souleymane Koly et l’Ensemble Kotéba, Dan Gna (1999), réalisé avec Souleymane Koly (direction musicale) et Angélique Kidjo (chant, arrangements) et Faso den (2000), enregistré avec des artistes de l’Ensemble Kotéba, réalisé par Jacky Reagan et arrangé par Marcellin Yacé et Alhassane Soumano. Au départ de Niama Kanté après son mariage, le trio devenu duo avec Awa Sangho et Maaté Keïta enregistre en 2006 WAF: West African Feelings, un opus arrangé par Cheick Tidiane Seck, donné par des guitares, djembé, basse, kora, tambin (flûte peule) et ngoni, et chanté en malinké, bété, songhaï, bamana (bambara), khasonkhé, nouchi ou français.

Renouer avec une tradition vivante

“Cela fait maintenant vingt ans que l’Ensemble Koteba d’Abidjan existe, que nous travaillons dans un style particulier, fait de théâtre, de musique et de danse. Voilà quinze ans que nous tournons nos spectacles dans des endroits très différents. Mais, nos créations restent très africaines. Je ne sais pas ce que c’est produire pour le public occidental. Nous essayons de monter des œuvres qui correspondent à ce que les gens vivent ici. Pour constituer le premier noyau du Kotéba, j’ai recruté, à Abidjan, des jeunes gens en les regardant bouger, en parlant avec eux, sans tenir compte de leur origine sociale, ni de leur niveau de connaissance de telle ou telle langue. De fil en aiguille, nous nous sommes mis à travailler les différentes disciplines que nous pouvions mettre en place : la danse, la musique, le texte. Ce n’est pas venu par hasard. Dans un espace multi-linguistique, comme celui que nous connaissons, utiliser une langue nationale et une seule, c’est forcément se couper des gens. Utiliser exclusivement le français, c’est la même chose. On ne peut pas parler de théâtre national, si le théâtre que vous faites ne correspond à rien pour l’Africain qui ne comprend pas le français. Quand je parle de théâtre national à propos du Kotéba, cela veut dire que le professeur d’université ivoirien, le chauffeur de taxi ivoirien ou la vendeuse du marché ivoirienne, que tous ces gens-là se reconnaissent dans le théâtre que nous faisons. Cela veut dire que nous pratiquons un théâtre dans lequel tout Africain, quelle que soit son origine, puisse jouer. Un théâtre qui puisse être compris par tout Africain, quel que soit son niveau de culture. Il fallait donc faire appel à des disciplines artistiques qui permettent, par delà les mots, de traduire et de faire passer une idée sur scène. Ainsi, par des voies détournées, sans réflexion théorique préalable, le Kotéba renoue avec la tradition du spectacle africain (d’ailleurs toujours très vivante) qui ignore la coupure des genres. Je crois que l’esprit Kotéba, c’est une forme de folie qui nous pousse à nous battre, une solidarité qui nous permet de résister dans les périodes difficiles. Un choix qui me fait dire : Commençons avec nos moyens, à notre niveau et progressons ensemble. Ce n’est pas parce que d’autres en sont à l’ordinateur, qu’il faut nécessairement que nous en arrivions à l’ordinateur. Cela s’inscrit dans une perception générale. Non seulement, ce n’est pas la peine, sous prétexte d’être moderne, d’importer des trucs qui nous écrasent à tous points de vue, mais si je peux exprimer ma pensée profonde, je suis convaincu que nous pouvons trouver, dans notre société, les principes fondateurs de ce qui se fait ailleurs. Cette réflexion se trouve, de façon très diffuse dans pratiquement tous mes spectacles”, confie Souleymane Koly.

Lieu de rencontre et d’échange, la compagnie met l’accent sur la formation, avec la création comme dynamique de groupe. Ainsi de nombreux artistes africains de notoriété internationale comme Manu Dibango, Ali Farka Touré, Ray Lema, le djembéfola Mamady Keïta ou Amara Kanté ont collaboré avec l’Ensemble Kotéba.

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Souleymane Koly n’est plus

En 2011, Souleymane Koly décide de rentrer en Guinée avec l’espoir que le nouveau président Alpha Condé placerait le pays sur la voie d’une vraie démocratie pour ses compatriotes. Il accepte alors d’être Conseiller principal chargé du développement culturel international au ministère de la Culture. Mais, très vite, il déchante, constatant que rien ne bougeait au plan institutionnel. Il se retire alors pour se consacrer entièrement à ses activités artistiques.

Le vendredi 1er août 2014, Souleymane Koly décède des suites d’une crise cardiaque à son domicile, à Lambandji, un quartier de la banlieue de Conakry. Il avait presque 70 ans.

* Source : http://www.abidjan.net/

Crédit photo : http://www.faar.free.fr/

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Nago Seck

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