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“ Auteur-compositeur, interprète et guitariste virtuose d'origine Yoruba, Sunday Adeniyi aka King Sunny Ade ou KSA est né le 22 septembre 1946 dans l'Etat d'Ondo, au sud-ouest du Nigeria. Sa juju music électrique est caractérisée par une forte présence des tambours (bongos, congas), des gangans (talking drums), des dunduns (ensemble de 2 ou 3 talking drums réunis) et de la guitare hawaïenne. King Sunny Ade innove plus tard en fusionnant trois courants populaires yoruba, la juju music (à l'origine liée à la vie sociale et politique traditionnelle), l'apala (à l'origine, une musique purement religieuse) et la fuji (des musulmans Yoruba). Sa juju électrique de Sunday Adeniyi dit «~King Sunny Ade~» est caractérisée par une forte présence des tambours, des talking drums et de la guitare hawaïenne.”

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Moses Olaiya

Fils de pasteur issu d’une famille royale Udoh, King Sunny Ade a baigné très jeune dans la juju, la musique populaire yoruba, avant d’en faire sa raison de vivre, sous l’influence artistique du grand I.K. Dairo MBE. Comédien dans la troupe de Baba Sala d’Ibadan puis joueur de congas, il intègre en secret, encore adolescent, la formation highlife de Moses Olaiya à Lagos, et s’initie à la guitare. Par la suite, il rejoint le groupe d’un des précurseurs de la juju moderne, Tunde Nightingale, une conversion définitive à ce courant musical. C’est le début de la carrière de celui qu’on appelle à présent Chief Sunday Adeniyi. Il prend comme nom d’artiste King Sunny Ade (le Roi Soleil) en 1966, crée son propre groupe, Green Spots Band, en référence aux Blue Spots de son idole I.K. Dairo MBE, et sort en 1967 son premier 45T, Challenge Cup 1967 / Qlalekan Salami. Le titre “Challenge Cup 1967”, composé à l’occasion de la Coupe du Nigeria de football en 1967, devient ainsi son premier hit.

Synchro-system

En homme d’affaire averti, “The Chairman” comme on l’appelle au pays, rebaptise en 1971 sa formation African Beats et transforme radicalement la structure de sa musique. Il enregistre en 1974 Sunny Ade vol. 1 (dont le populaire “Esu Biri Ebo Mi”), sous son propre label Sunny Alade Records, fondé la même année, puis sort en 1976 Late General Murtala Muhammed vol. 4, une chanson sur le général Murtala Ramat Muhammed (1938-1976). Ce dictateur fut le chef du gouvernement militaire fédéral du Nigeria du 29 juillet 1975 jusqu’à son assassinat le 13 février 1976, lors d’un coup d’État manqué, orchestré par le lieutenant colonel Bukar Dimka.

En 1977, année de la parution de Sound Vibration/ Kiti-Kiti, la presse nationale l’intronise “King of Juju Music” (Roi de la juju). Son label Sunny Alade Records sort en 1979 The Royal Sound, et parallèlement, il crée la structure Sunny Ade Organisation (management, agence artistique, productions à l’étranger).

Marqué par la richesse de la langue yoruba, King Sunny Ade transforme radicalement la structure de sa musique baptisée “Synchro-System” : il réintroduit dans le genre les incantations et les vers puisés auprès des anciens, renforce les harmonies yoruba et intègre des sonorités pop, la pedal-steel guitar, les synthétiseurs, l’accordéon, le vibraphone et les effets dub des computers. Sunny Ade crée ainsi un nouveau son caractérisé par les rythmiques fluides aux accents funky, à base de guitare basse, de batterie, gangan (talking drum), de dundun (ensemble de 2 ou 3 talking drums réunis), de bongos, de congas, d’agogô (cloches), shekere et de claves (paire de baguette en bois cylindriques frappes l’une contre l’autre) et de riffs de guitare rock. Le synchro-system consiste à laisser chaque instrument développer une variété de rythmes et de mélodies en même temps que les autres. Toutes les sonorités sont arrangées de telle manière que les instruments ne se chevauchent. Cette synchronisation parfaite mais très complexe lui vaut le surnom de Master Guitarist et un succès continental de premier ordre.

Succès américains et japonais

En 1982, deux ans après la mort de Bob Marley, la multinationale Island Records mise sur King Sunny Ade (KSA pour les Nigérians) qui a déjà vendu plus de 12 millions de disques sur l’ensemble du continent africain. Island sort mondialement l’opus Juju Music (dont le fameux “Ja Funmi”), produit par le Français Martin Meissonnier et aussitôt classé dans les charts de plusieurs pays du monde. Le français réalisera également en 1983 Synchro System (nominé aux Grammy Awards aux Etats-Unis), puis, en coproduction avec KSA, Aura, réalisé avec Stevie Wonder (harmonica) et Santa Mamola (guitare) sur le titre “Ase”, Akanbi Moses (drums) sur “Ogunja”, Phil Ramocon (clavinette) et Tony Allen (batterie) sur “Oremi”. Le featuring de la vedette américaine Stevie Wonder sur le titre “Ase” a pu se faire, grâce en partie à son ancien percussionniste, le Sénégalais Massamba Fall aka Maaskool qui l’a présenté à Martin Meissonnier et King Sunny Ade avec lequel il avait collaboré.

Chouchou des magasines, des télévisions et des salles de spectacle, le nouveau poulain d’Island part alors à la conquête de la planète, Europe, Amérique du Sud, Australie, Caraïbes, Asie, Afrique, Canada et Japon où King Sunny Ade demeurera longtemps l’artiste africain le plus populaire. Aux Etats-Unis, le succès est tel que Hollywood le sollicite pour participer à des bandes originales de film : “Breathless” (A bout de souffle) de Jim McBride en 1983, “O.C. and Stiggs” (Vous avez dit dingues ? ) de Robert Altman en 1985 et “One More Saturday Night” de Dennis Klein en 1986.

Ministre des réjouissances

Pourtant, six mois à peine après une apparition en Rolls à la TV britannique, King Sunny Ade est remercié par sa maison de disques. L’année 1985 signe donc la fin d’une collaboration démarrée sur les chapeaux de roue. Cependant, ce divorce n’entame en rien la volonté du Roi Soleil qui crée un nouveau label en 1986, Atom Park, et enregistre Sweet Banana et My Dear, suivis de Jealousy et Merciful (1987). Un an plus tard, il réalise The Return of the Juju King (Mercury), The Child et Destiny (Atom Park), suivis de la sortie mondiale de Live Live Juju. L’année 1989 voit le Roi Soleil enregistrer avec la chanteuse Onyeka inwenu Wait For Me, un véritable programme de mesures sociales révélant son implication dans la vie sociale et politique nationales. En 1992, King Sunny Ade lance un nouveau label, Sigma Disc, avec la sortie de son album Surprise. un an plus tard, il coproduit avec l’Américain Andrew Frankel E.Dide / Get up, un CD dédié à la mémoire de L.A.K. Adeniran, l’ingénieur du son qui fut, de 1978 à 1995, le maître d’oeuvre des studios Afrodesia de Lagos et travailla avec toutes les grandes pointures du Nigeria. Nommé “Ministre des réjouissances” par le gouvernement nigérian, King Sunny Ade demeure un compositeur très adulé dans son pays natal où il a ouvert son propre club, l’Ariya, continuant de chanter le quotidien de son peuple et le mysticisme de la science yoruba.

Contrairement à Chief Ebenezer Obey qui a privilégié une carrière beaucoup plus nationale, King Sunny Ade a permis à la juju de se tailler une place confortable auprès d’un public international. Son succès au Japon notamment a ouvert une brèche à la musique africaine aujourd’hui largement représentée au pays du Soleil Levant.

Production discographique

Référence de nombreux jeunes artistes dans son pays, King Sunny Ade aka KSA reste une des valeurs sûres de la juju music yoruba, revenant toujours sur le devant de la scène avec des albums ou cassettes de bonne facture, dont Authority et Get Up (1990), Live At The Hollywood Palace et The Way Forward (1994), Ogun (1997), Odu (1998) (nominé aux Grammy Awards aux Etats-Unis), Kool Samba (1999), Seven Degrees North et Juju-Apala Live (feat. Haruna Ishola) (2000), fusion de deux courants populaires yoruba, la juju et l’apala (à l’origine, une musique purement religieuse). Sortiront aussi d’autres réalisations, comme Owanbe (Live) (2003), Divine Shield (2004), Blessing et Grace of God (2008), Baba Mo Tunde et Morning Joy (2010), Happy Moments et Freedom Fighter (2011), My Year (2013)… sans oublier les compilations, comme His Evergreen Hits (1998), Classics vol. 1 à 6 (2001), King of Juju : The Best of Sunny Ade (2002), Best of the Classic Years (2003), Gems From The Classic Years : 1967-1974 (2007) ou encore Nigerian’s Juju-Highlife at it’s Best (2010…

King Sunny Ade Foundation

Homme au grand cœur et soucieux de l’avenir des Africains, King Sunny Ade lance dans les années 1990 à Lagos, en partenaiat avec les décideurs locaux et des hommes d’affaire, la King Sunny Ade Foundation (Fondation King Sunny Ade). Située sur un terrain de 5 hectares offert par le gouvernement de l’État de Lagos, La Fondation comprend un centre dédié aux arts du spectacle, un studio d’enregistrement entièrement équipé et un logement pour jeunes chanteurs, interprètes et musiciens. Egalement, elle soutient financièrement les enfants des musiciens décédés mais aussi des musiciens âgés et ne pouvant plus se produire pour vivre de leur art.

« Le but de la Fondation est de venir en aide aux déshérités de différentes origines et dans diverses professions : « Ceux qui veulent être des musiciens, étudier la musique ou apprendre le jeu d’acteur…, même les personnes âgées, peuvent faire partie de la Fondation King Sunny Ade. Je veux partager avec eux le fruit de mon succès », dit le Roi Soleil.

« Je pense que c’est mieux pour moi de faire ceci de mon vivant. La plupart des fondations sont créées après la mort du fondateur. Je veux voir que cela marche. Et si Dieu le permet, je continuerai à le faire », poursuit King Sunny Ade.

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Nago Seck

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