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“Super Eagles (devenu Ifang Bondi) fut le premier à moderniser la musique gambienne, injectant des percussions "sabars" dans ses premiers tubes tels "Mandaly". L'âme de cet ex-groupe, Badou Diop, poursuit sa voie avec Ifang Bondi. Super Eagles (actuel Ifang Bondi) fut le premier à moderniser la musique gambienne, injectant des percussions "sabars" dans ses premiers tubes tels "Mandaly". L'âme de cet ex-groupe, Badou Diop, poursuit sa voie avec Ifang Bondy.”

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Badou Diop et Pape Touré

En 1967, en pleine période pop, dans un pays anglophone, la Gambie, enclavé dans un pays francophone, le Sénégal, naît à Bathurst (actuel Banjul), sous l’impulsion de deux amis d’enfance, Badara Diop aka Badou Diop et Ibrahima Touré aka Pape Touré, le groupe Super Eagles. Les divers courants musicaux déferlant par les ondes sur le pays (la pop anglaise avec BBC, le highlife ghanéen et la soul avec Radio Sky et l’afro-cubain avec Radio Sénégal) jouent un rôle essentiel dans l’orientation musicale du groupe.

Influencé dès son jeune âge par les chants des djélis (griots) et le Ritz Orchestra de Gambie (highlife, jazz, tango), Badou Diop (basse) débute à 19 ans dans le groupe African Jazz of Bathurst en compagnie de son ami d’enfance Pape Touré (voix). Y jouent Laba Sosseh (voix, congas), Sammy (guitare, congas), Marcelin (voix, congas) et le Malien Sékou Diallo (guitare).

Super Eagles

C’est à cette époque que Badou Diop, fils d’un père noble qui le destinait au métier d’avocat comme son frère, abandonne ses études, s’intéresse à l’écriture musicale et commence à acheter des livres avec ses maigres cachets pour apprendre le solfège en autodidacte… Plus tard, il rejoint, avec Pape Touré, le Foyer Orchestra avant de fonder ensemble les Eagles puis le Super Eagles…
Super Eagles est alors composé de jeunes artistes marqués par la soul, la pop, le highlife, l’afro-cubain, la rumba et la morna : Badou Diop (chef d’orchestre, guitare, basse, kora), Pape Touré (voix), Mamadou « Modou » Thiam (percussions, sax), Charly Valentine (basse), Oussou Ndiaye (voix), Malan « Malando » Gassama (batterie, percussions), Daouda Ndiaye aka Edward Hafner (chant), Francis « Senami » Taylor (guitare, claviers). A ceux-là s’ajoutent Aliou Kâ (manager), Doudou Samali (ingénieur du son) et Lamine Dramé (road manager)…

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Sous la houlette de Badou Diop et de Francis Taylor, le Super Eagles, après avoir interprété des reprises (« Hey Jude » des Beatles et autres…) s’oriente vers le jazz fusion et la pop-soul avec des effets électriques (claviers, guitares), y injectant du ndagga (rythme populaire gambien), des sonorités mandingues, des rythmiques de sabars (mbalax), le tout chanté en wolof, en anglais ou en « broken english » par Pape Touré à la voix à la fois rauque et cassée.

Viva Super Eagles, l’envol

Cette formule inédite gravée connaît dès 1968 un immense succès avec les titres « Viva Super Eagles » et « Mandal Ly » dont l’impact sur le public sénégambien et ouest africain leur ouvre les portes d’une tournée au Sénégal et au Ghana. Leur passage en Angleterre est marqué par un concert mémorable au Commonwealth Institute de Londres où ils sont rejoints sur scène par Teddy Osei et Mac Tontoh du groupe ghanéen Osibisa et par l’enregistrement de du disque « Viva Super Eagles » (un appel aux Gambiens à soutenir le groupe). La parution de cet album qui parle d’unité africaine, d’amour, de corruption, de la jeunesse ou des maladies va faire d’eux l’un des groupes incontournables de la scène ouest africaine. En 1970, au sommet de leur art, le Super Eagles opère un virage artistique fulgurant, s’appuyant sur une structure de base typiquement africaine. Certains membres tels que Badou Diop et Pape Touré décident de prendre du recul et d’entreprendre des recherches sur le patrimoine traditionnel du pays.

Ifang Bondi

Cet enracinement musical n’est pas sans rapport avec les relations étroites qu’entretiennent la Gambie et le Sénégal, un pays qui vit les mêmes développements musicaux… En effet le lien entre la Gambie et le Sénégal est d’abord culturel : on y retrouve les mêmes peuples, Wolof, Mandingue, Peul, donc les mêmes traditions musicales. Il est aussi économique : la Gambie est un tout petit pays d’un million d’habitants qui n’offre que peu de perspectives à ses musiciens. Les artistes se tournent donc tout naturellement vers le Sénégal et ses clubs, le Miami, le Ngalam, le Sahel. L’enracinement s’expliquera en partie par ce lien étroit. Il y a en fait au Sénégal tout un mouvement musical autour des racines wolofs et mandingues : l’UCAS Jazz de Casamance a été le premier à la fin des années 1950 à introduire la kora dans la musique de danse, Xalam va moderniser le mbalax suivi d’autres groupes comme le Star Band de Dakar, le Kaad Orchestra, le Sahel. En 1971, Le Super Eagles séjournera d’ailleurs plusieurs mois à la Médina, le quartier populaire de Dakar, confrontant leurs visions musicales à celles de nombreux musiciens sénégalais dont Cheikh Tidjane Tall, Magaye Niang, Madiama Fall, Seydina Insa Wade… Ce séjour leur offre aussi l’occasion d’enregistrer l’un de leurs plus gros tubes, « Saraba ». En 1973, à l’image de Xalam, groupe pionnier du mbalax au Sénégal, le Super Eagles prend un nom africain, Ifang Bondi (nom d’un masque mandingue et une expression qui signifie « Sois toi-même »). En 1977, Ifang Bondi sort « Saraba », un album réalisé par le label Disques Griot et mêlant ndagga (rythme populaire gambien), mbalax, musique mandingue, musique pulaar (peule), highlife, afro-cubain, pop-soul et blues.

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Nago Seck

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