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Né le 2 Décembre 1945 à Kinshasa ( République Démocratique du Congo), l’auteur-compositeur, arrangeur, guitariste et chanteur à la voix puissante, Samuel Bumba Massa aka Bumba Massa, est une des figures emblématiques de la rumba. Fondateur de Cubana Jazz et du label SBM Music Production, et membre fondateur de Lovy du Zaïre et de Kékélé, cet artiste naviguant aussi dans le soukouss, l’afro-cubain, et même l’afro-zouk et l’afro-dance, a collaboré avec de nombreux artistes et groupes, dont Bavon Marie-Marie, Lokassa ya Bongo, Jamel Jazz, Jean Bokelo & Conga 68, Carroussel, Franco & TP OK Jazz, Les Redoutables, Ntesa Dalienst, Djengaka Espérant… ”

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Bavon Marie-Marie, l’ami d’enfance

A l’âge de 9 ans, Samuel Bumba Massa baigne dans les mélodies de son père qui l’initie au chant et à la guitare, un instrument auquel il s’adonnera des années durant. Il faut attendre 1960 pour entendre l’une de ses premières compositions, « Calinda mucho mucho », un cha cha cha qui va le révéler au public. En 1962, alors en vacances dans la commune Boko (ville de Mbanza-Ngungu – localité du Kongo), il fait la connaissance de Siongo Bavon Marie-Marie de Negros Succès fondé en 1962 par Léon Bolhen Bombolo. A cette époque, Bavon Marie-Marie « tait déjà très doué à la guitare, influencé qu’il l’était par son grand-frère François Luambo Makiadi aka Franco. Ensemble, ils forment un duo (guitares, voix), commencent à animer diverses fêtes de la commune et deviennent très populaires dans la région. Les deux artistes resteront toujours amis.

Cubana Jazz, Orchestre Jamel

Jusqu’alors passionné de guitare, Samuel Bumba Massa, appelé Samuel par les intimes, décide de s’orienter réellement vers le chant, et monte en 1963 à Kinshasa, en tant que lead vocal, son premier groupe, Cubana Jazz, comprenant entre autres son ami guitariste Bavon Marie-Marie, le chanteur ténor Amba Léon aka Amba Zozo ou Zozo, le saxophoniste-chanteur Empompo Loway aka Deyesse et le percussionniste Matondo Nzuani aka Zoé Matondo ou Zowé Matondo ou Joe Matondo. L’originalité de cette formation, ce sont ses compositions intégrant de la rumba cubaine et ses textes sur le quotidien des Congolais, l’amour (« bolingo » en lingala) ou les femmes avides d’argent. Elle devient bien vite populaire auprès des mélomanes et des jeunes Kinois habitués de Chez Tshibangu, un nganda (bar-restaurant-dancing) situé dans la commune de Bandalungwa, à Kinshasa. Mais ce succès sera de courte durée. En effet, le célèbre Franco ne souhaite pas que son frère Bavon Marie-Marie fasse de la musique son métier, et fait tout pour que Monsieur Tshibangu, le propriétaire des lieux, ne programme plus l’orchestre. Ainsi prend fin cette première aventure de groupe. Dès lors, Bumba Massa va collaborer avec plusieurs formations aux styles divers, s’imposant comme l’une des meilleures voix dans le milieu musical de la capitale congolaise.

En 1965, alors que le pays vit au rythme de la rumba congolaise, Samuel Bumba Massa rejoint en compagnie de son ami Empompo Loway, l’orchestre Jamel Jazz de Verckys Kiamuangana (saxophone), Voukys et Thomas (voix), Fauvette (basse) et Flugor (batterie). Cette formation pépinière qui prendra le nom de Jamel Jazz National sous la direction de Sabu, puis Orchestre Jamel, a accueilli de nombreux artistes, dont Wuta Mayi, Papa Noël Nedule aka Nono Noël, Aimé Kiwakana, Tobby, Dave Makondele ou encore Rossy. C’est avec ce groupe qu’il découvre les studios d’enregistrement pour la première fois, participant avec la chanson Martina au clair à leur album éponyme « Orchestre Jamel’, paru chez Columbia, dans la série Présence Mondiale – Esengo en 1966.

Autres collaborations

Après avoir laissé sa marque dans l’orchestre Conga 68 de Jean Bokélo comme guitariste-chanteur en 1968, Samuel Bumba Massa rejoint en 1970, année de la mort de son ami Bavon Marie-Marie, la formation Carroussel soutenue par Georges Collinet, célèbre journliste d’origine camerounaise de « Voice of America » (La Voix de l’Amérique), légendaire radio-télévision américaine (plus de 120 millions d’auditeurs par jour). L’année suivante, il intègre Les Negros Succès, avant de cofonder en 1972 l’éphémère orchestre Lovy du Zaïre avec Vicky Longomba (1932-1988), son idole et extraordinaire chanteur surnommé « le rossignol ». En 1976, il est aux côtés de Franco, leader du fameux groupe TP OK Jazz avec lequel il enregistre, en tant que compositeur et vocaliste, le 45 tours « Dapa Zongisa Motema ». C’est au sein de cette formation de rumba et de soukouss congolais qu’il se fait appeler Bumba Massa – jusque-là on le surnommé Sammy ou Samy, son premier prénom.

Carrière solo

Lorsque Bumba Massa quitte Franco & TP OK Jazz en 1978, il se lance dans une carrière solo et sillonne les capitales de l’Afrique de l’Ouest de 1978 à 1980. Il joue ainsi à Lomé (Togo) où il enregistre, au Studio Otodi, son album « L’argent et la femme » (1982 – Star Musique/Disco Stock), avec des compatriotes et ex musiciens de Tabu Ley Rochereau, comme Bopol Mansiamina, Syran Mbenza et Lokassa ya Mbongo. Il tourne ensuite à Porto-Novo (Bénin), Lagos (Nigeria) et Abidjan (Côte d’Ivoire).

Par la suite, il part à la conquête de l’Europe : Bruxelles (Belgique) puis Paris (France) où il s’installe et enregistre « Dovi », paru en 1983 chez Syllart Productions, le label du Sénégalais Ibrahima Sylla. Les années suivantes le voit sortir plusieurs albums : « Bumba Massa et Les Redoutables » (1985), un opus enregistré avec les musiciens du groupe de soukouss congolais, Les Redoutables, qui accompagne la diva de la musique congolaise, Abeti Masikini (1954-1994). « Marie Theresa » (1985), sorti chez Afro-Rythmes comprend Opika, un clin d’oeil aux Editions Opika, nées en 1950 des cendres de Kina, un label créé à Kinshasa par les frères Gabriel et Joseph Moussa-Benathar, originaires de la Belgique. Le nom Opika est tiré de l’expression « opika pende » qui veut dire « tiens bon » en lingala. Quant à « Baromètre » (1990), il est enregistré avec l’Orchestre Opika-Sebene (1990). Le sébéné est un rythme traditionnellement fougueux et saccadé, décliné dans la musique urbaine en une longue exécution instrumentale mettant en exergue des riffs de guitare tournoyants genre rock.

En 1990, Bumba Massa sort « Baromètre », un album enregistré avec l’Orchestre Opika-Sebene. Le nom « Opika » est tiré de l’expression « opika pende » qui veut « tiens bon » en lingala. Quant à « sébéné », c’est un rythme traditionnellement fougueux et saccadé, décliné dans la musique urbaine en une longue exécution instrumentale mettant en exergue des riffs de guitare tournoyants genre rock. L’opus comprend Dance-Music, une reprise du fameux « Ami O » au beat makossa du Camerounais Manfred Ebanda (1935-2003), et Adieu Longomba, un hommage à Vicky Longomba (1932-1988)…

Kékélé

Désireux de faire revivre la rumba congolaise dominée par le soukouss, le ndombolo et le tchaku libandas (trois musiques de danse congolaises), le créateur de la formation afro-cubaine Africando, Ibrahima Sylla, lance en 2000 à Paris le groupe Kékélé (du mot « n’kékélé » qui veut dire « liane » en lingala). Pour cela, il réunit de talentueux artistes congolais, dont Bumba Massa, Nyboma Mwan’dido, Marcel Loko Massengo aka Djeskain, Wuta Mayi et Syran Mbenza. C’est ainsi que Bumba Massa participe aux albums du groupe sortis chez Syllart Productions/Stern’s : « Rumba Congo » (2001), « Congo Life » (2003) et « Kinavana » (2006).

Le retour en solo de Bumba Massa

En 2009, Bumba Massa, âgé de 65 ans, revient en solo sur le devant de la scène avec « Apostolo », un album enregistré à Paris (France) et sorti chez Sina Performance. Fidèle aux styles qui ont fait sa réputation, la rumba congolaise et la salsa africaine (afro-salsa ou afro-cubain), cet opus chanté en lingala (sa langue) ou en français met en exergue sa voix puissante, conforme à la grande tradition des vocalistes congolais.

L’année 2017 le voit sortir « V70 », un opus de rumba congolaise et d’afro-cubain célébrant ses 54 ans de carrière, mais aussi un intitulé évoquant le parcours et l’enthousiasme de cet artiste qui a plus de 70 ans. « Ma voix est comme le bon vin : plus elle vieillit, meilleure elle est », dit en substance l’un des derniers dinosaures de la musique congolaise.

L’opus s’ouvre sur Batindi yo Bumba, une chanson rappelant que Bumba Massa a toujours baigné dans la rumba cubaine. Dans Amour, qui es-tu ?, il se pose des questions sur le « bolingo » (« l’amour » en lingala) souvent chanté par les Congolais. Quant à Souvenirs Vicky Longomba: Chéri Lovy / Tonton / Sentiment Emonani, c’est un hommage à son idole, l’excellent chanteur Victor Besange Lokuli Longomba aka Vicky Longomba (1932-1988) dit « le rossignol ». Avec ce dernier, il avait fondé en 1972 l’éphémère orchestre Lovy du Zaïre auquel il emprunte aussi Conseil d’ami.

Père du fantasque chanteur Awilo Longomba surnommé « Le propriétaire de tous les dossiers », et de la danseuse-chorégraphe Fili Longomba, Vicky Longomba a fait les beaux jours de nombreux orchestres de la rumba congolaise des années 1950/1970 : Les Negros Succès de Bavon Marie-Marie, OK Jazz de Franco, African Jazz de Joseph Kabasélé

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Nago Seck

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